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Made in France |
| Zaïr Kédadouche, 43 ans. Ecolo du béton, père FLN, mère illettrée. Mettrait volontiers un peu de Beurs dans l'Assemblée… | |
| Mon CV (format pdf) | |
| Mes trois propositions |
Il est en retard et souligne pourtant, goguenard, sa ponctualité. Puis il vous tutoie, très vite. Autour de nous, le Conseil Economique et Social étale son luxe grandiloquent et suranné, tout droit sorti d'un Bunker Palace Hotel de Bilal. Mais pour le gosse né à Aubervilliers, c'est "joli ici, n'est-ce pas ?" La voix est douce et feutrée. Oui, c'est joli. Un peu comme cette France qu'il rêve, Liberté, Egalité, Fraternité, Laïcité… Zaïr Kédadouche n'a rien préparé. Bien entendu. Zaïr, c'est avant tout une histoire qui se feuillette comme un livre d’images parfois tristes, souvent drôles. «Mon père a fait de la taule. Il était FLN. Il est mort quand j’avais 5 ans. La famille voulait qu’on rentre en Algérie. Ma mère a décidé qu’on resterait. Elle mettait déjà 5 minutes pour écrire son nom…» Le parcours commence ainsi, de manière un peu chaotique. Mais il y a cette curiosité qui le pousse et quelques mentors, à commencer par un vieux voisin, Monsieur Francis, un «bon Gaulois» qui apprend à la tribu Kédadouche à écrire et à lire – le Parisien essentiellement - supportant les chapardages ("on lui piquait tout" reconnaît-il comme s'il parlait d'un autre), méchancetés et autres ingratitudes enfantines. Puis, la vie s'est chargée de lui montrer qu'il faut toujours croire en sa bonne étoile… "Tout a toujours été le fait du hasard et de l'amour." Footballeur pro au Red Star, abonné des cours du soir, prof de technologie en ZEP, Zaïr devient conseiller à l'intégration d'Eric Raoult alors Ministre de la Ville avant d'atterrir à l'Inspection Générale des Affaires Sociales où son profil dénote un peu, «Ouais, le plan de carrière, je connais pas!» concède-t-il. Sang beur, sans reproches ? "Y'a prescription" se défend-il, le regard malicieux. Et Zaïr de narrer ces quelques larcins qui vous font comprendre la fragilité d'un parcours… "Une fois, j'ai quitté mes copains. J'avais un entraînement de foot. Et j'étais moins courageux… Ce soir là, il se sont fait arrêter et il y en a deux qui se sont retrouvés en prison. Ca m'a fait réfléchir." Il est long le chemin de l'intégration, les embuches nombreuses et le destin capricieux. Et sans paraître s'émouvoir, Zaïr évoque la perte de sa sœur qui toute sa vie cherchera comment on pouvait être à la fois française et maghrébine. Monsieur Kédadouche, lui, a réussi à répondre à cette question: «"On m'a déjà reproché d'être "l'Arabe de service". Mais, non, je suis un Français, d'origine arabe, au service. Je ne l'ai pas choisi. J'assume et je revendique les deux, c'est tout. » Un modèle ? Il n’en est pas sûr. Pourtant, l'anecdote tombe : "Une fois, j'étais à Berkeley. J'intervenais dans un colloque sur l'intégration. Même en anglais, ils ont deviné que j'étais parisien." Le sourire est large, le sentiment d’appartenance profond. Un sentiment qui le pousse dès 1983 vers les mouvements anti-racistes avant de fonder Génération Ecologie en compagnie de Brice Lallonde. "J'étais un écologiste du béton, se souvient-il. C'est-à-dire que j'aime bien la corrida, les grosses voitures, les constructions en béton, le bruit (rires)… En fait, j'aime pas la nature. J'étais un écologiste moderne ! En ville, l'écologie, indépendamment des petits oiseaux et des carottes rapées, c'est une vision de la société urbaine, une approche globale des problèmes urbains du 21e siècle. Qu'est-ce que ça veut dire «être écolo» quand on crève la dalle à Aubervilliers ? Quand on a faim, les déchets on s'en fout. C'est vrai, j'étais pas très d'accord avec les gars de Génération Ecologie..." Alors cette "Génération Terrain" dont tout le monde se réclame, parfois avec un certain aplomb, Zaïr Kédadouche, il en est. Il se bat donc pour une société où l'ascenseur social ne marcherait pas en fonction des prédispositions supposées de la génétique sociale… "Vous en connaissez, vous, des Députés beurs ? Des Ministres ? Des Secrétaires d'Etat ? Des Maires ? Apparemment, c'est pas facile de faire de la politique quand on s'appelle Mouloud ou Mohamed ? Au collège, c'est plus simple. J'ai même eu le prix de camaraderie une année. Mais là, c'est différent. J'aimerais tant que tous ces élus n'aient pas le même profil, qu'il y ait des footballeurs, des bouchers, des boulangers… La politique y gagnerait certainement en courage, imagination, tendresse, poésie… Tout cela m'inspire un grand sentiment d'injustice. C'est dramatique parce que si cela continue, nous basculerons dans une logique américaine de communautés et l'idée des quotas fera son chemin." Et ça, Zaïr est farouchement contre. "C’est comme pour cette réforme de l’admission à Sciences Po, Au lieu de se demander pourquoi il n'y a pas ou plus d'élèves issus de ZEP à Sciences Po, on va en intégrer de manière parallèle et discrétionnaire une vingtaine sur 4 000. Un pansement. C'est inefficace et stupide. Ce qui manque, c'est l'information. Quand j'ai passé mon baccalauréat, je savais même pas ce que ça voulait dire Sciences Po. Faudrait leur dire aux gars : "Tu veux du pouvoir ? Tu veux du fric ? Un bon boulot ? C'est là qu'il faut aller" Aurait-il donc toutes les qualités pour faire un excellent Parlementaire ? "Franchement, non. Je suis libéral, social, républicain, sécuritaire et écologiste, mais je grille les feux rouges en Solex (je continuerai sans doute confesse-t-il) et je fais pipi sur les murs.» Une tare que nous serions disposés à supporter. C'est l'histoire d'un Beur qui voudrait dépasser le stade du témoignage, qui bosse et qui y croit. Il a raison: Zaïr, en arabe, ça veut dire la chance.
Portrait écrit pour Génération Terrain par Chasseurs de nouveaux talents politiques |
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Un bon gaulois |
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Le
plan de carrière, |
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Sans beur, sans reproches ? |
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Vous en connaissez, vous des Députés beurs ? |
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Zaïr en Arabe ça veut dire la chance |
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